C’est un virage historique qu’entreprend La Cervoiserie. Créée en 2004 et franchisée fin 2010, cette dernière lancée par Dominique Batard a en effet été rachetée en mars dernier par C10, le distributeur et grossiste de boissons, également détenteur de la marque Comptoir des Vignes. Échange avec le dirigeant pour comprendre en quoi ce rachat par ce géant qui dessert le CHR bénéficie à l’enseigne et à ses franchisés.
Avant de parler du rachat qui s’est opéré au printemps dernier, revenons sur la genèse de votre enseigne…
J’ai lancé La Cervoiserie en 2004 sur un concept de cave et bar à bières de spécialités en afterwork, sur des zones commerciales au départ. J’évoluais depuis un certain temps dans le milieu, vendant de la bière depuis 1998 ! Une première franchise a ensuite vu le jour à La Rochelle en 2010, suivie d’un lancement en réseau avec, de mon côté, l’envie de transmettre mon expertise du marché et du produit, ainsi que mes méthodes de travail, à d’autres entrepreneurs (et futurs partenaires). Au moment du rachat, opéré par C10 en mars dernier, l’enseigne recensait 33 unités. Il s’agit d’établissements dont la superficie varie entre 300 et 400 m2. Ils disposent d’un double agencement : un espace bar avec un peu de grignotage sur place et magasin, avec une partie ‘biérothèque’, davantage dédiée aux achats cadeaux. Car la force du concept est aujourd’hui de proposer 300 spécialités de bière à la clientèle et des spiritueux. Pour la partie bar, il y a aussi la possibilité de déguster jusqu’à 12 bières pression ! Parmi ces 33 unités, deux succursales (La Rochelle et Rochefort) sont dédiées à la formation des nouveaux franchisés.
Dans quel contexte est survenu le rachat opéré par C10 ? Pouvez-vous nous en expliquer les raisons ?
Il faut croire qu’à force de développer des points de vente, je suis entré dans les radars des gros acteurs du secteur ! Nous avions déjà échangé, C10 et moi-même, il y a quelques années sur la question d’un rachat de ma franchise, mais cela n’avait pas abouti. La direction du groupe m’a ensuite recontacté fin 2021 pour renouer le dialogue. Mes équipes et moi-même avons tout de même réussi à ouvrir 10 franchises ces deux dernières années. Et ce, malgré la crise sanitaire. Néanmoins, arrivé à un certain stade de maturité, et après avoir dépassé une certaine taille, j’ai senti que La Cervoiserie avait besoin de plus. J’ai donc ressenti le besoin de me faire accompagner et j’ai signé avec Guillaume de Marcellus, son directeur général. Ce rachat va également créer des synergies bénéfiques à tous. Non seulement C10 va pouvoir muscler sa branche bière (qui représente déjà 45 % de son activité sur le marché hors-domicile , sans compter l’activité générée par sa marque Comptoir des Vignes), mais cela va aussi renforcer la logistique de La Cervoiserie. Notamment grâce à l’expertise de C10 (1,5 milliards d’euros de CA en 2022, plus de 95 adhérents, 230 entrepôts), en termes de logistique et de distribution, là où je bataillais de mon côté. Je dirais donc qu’il s’agissait plutôt d’une belle opportunité de croissance, plutôt qu’une alliance motivée par d’autres raisons.
De quelles façons les franchisés vont-ils en bénéficier ?
Les partenaires du réseau vont d’abord bénéficier de la puissance d’achats du groupe C10, particulièrement intéressante pour notre marché, notamment en matière de négociation et de volumes d’achats. Mais l’affaire venant d’être conclue, la nouvelle organisation n’a pas encore été établie. Ce n’est pas encore opérationnel, mais nous avons l’ambition de profiter de son expertise sur la partie distribution. Aussi pour développer davantage de points de vente sous enseigne. Et monter des opérations plus intéressantes encore avec nos partenaires. À noter que nous avons déjà des brassages exclusifs. Ce qui nécessite, là encore, de lancer un minimum de volume aussi, côté fournisseurs. En revanche, pas de nouveautés à prévoir autour du concept pour les franchisés. Nos partenaires auront simplement davantage de souplesse en termes de gestion des approvisionnements. Et pourront continuer à travailler avec des acteurs locaux sur des gammes validées au préalable par la direction de la franchise. J’ajoute aussi qu’il est plutôt rare sur le marché et parmi les franchises, non pas d’avoir leur propre brasserie (ou partenaire brasseur) pour fabriquer leurs propres produits, mais d’avoir un groupe qui les soutienne, comme c’est maintenant le cas pour nous. C’est même nouveau, au regard de ce qui peut se faire.
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Vous évoquiez Comptoir des Vignes, la marque du groupe C10, réservée à ce jour à ses adhérents. Y aura-t-il des synergies ou des passerelles entre elle et votre franchise à l’avenir?
Il n’y a pas, à ma connaissance, de synergies prévues avec les franchisés à ce sujet. Mais peut-être qu’à l’avenir nous proposerons une offre de vins à nos clients, avec leurs partenaires vignerons ?
En parlant d’offre, quel regard portez-vous sur le marché tricolore de la bière aujourd’hui ?
La France compte aujourd’hui environ 2 500 brasseries, c’est la preuve que ce savoir-faire perdure ! De son côté, La Cervoiserie recense même une centaine de partenaires pour 500 références de bières proposées sur le réseau, et donc aux clients. Mon constat : le marché de la bière est reparti à la hausse après un arrêt brutal de l’activité du CHR en 2020. La progression, en termes de consommation, est également moins forte depuis trois mois. Néanmoins, nous sommes revenus aux bases de 2019. Aidés aussi, depuis quelques années, par l’émergence de nouveaux produits qui mécaniquement captent aussi une nouvelle typologie de clients. C’est notamment le cas avec la bière sans alcool, avec une quinzaine de références chez nous notamment, les craft beers, artisanales ou encore la bière tourbée, ou iodée. Quant aux bières allemandes, les weiss, elles sont encore méconnues des consommateurs, un peu mises à l’écart face au succès des IPA depuis dix ans maintenant ou des lambic, plus acides et fermentées.
Le but étant maintenant de trouver des pépites en avant-première et de continuer à les commercialiser dans le temps. Proposer des bières éphémères c’est très bien pour évènementialiser son point de vente, mais, du moins chez La Cervoiserie, nous cherchons surtout celles et ceux qui font perdurer les recettes, savent et peuvent les refaire. Et puis, la bière a été fortement impactée par la hausse du coût des céréales et des emballages. Comme tous, on essuie maintenant 10 à 20 % d’augmentation.
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C’est aussi tout le travail des équipes achats au sein de l’enseigne…
En effet puisque nous avons justement développé une branche craft avec le service achats pour découvrir des nouveautés et faire de la veille de tendances sur le marché. En plus d’avoir aussi notre propre recette, la Rivoise, anagramme de Cervoiserie, élaborée avec l’université de La Rochelle.
Qui dit rachat, dit croissance. Dans quelles villes allez-vous ouvrir en 2023 ?
Le point de vente de l’Ile de Ré fête sa première année d’ouverture, mais nous avons encore de nombreuses autres villes à mailler. Avec 5 projets cette année, sur les villes de Plérin, Dinan, Pessac, Villeneuve-sur-Lot et Rennes.
Quel est le ticket d’entrée pour faire partie de l’aventure La Cervoiserie ?
Pour ouvrir chez nous et pour 7 ans, il faut idéalement disposer d’une enveloppe globale de 150 000 euros qui comprend un droit entrée à 20 000 euros. Et prévoir un stock de départ de 50 000 euros, inclus à ce même montant. Nous recommandons aussi au candidat de disposer d’un apport personnel de 100 000 euros pour sécuriser leur projet au vu des banques.