Hausse de l’ILC, vacance commerciale, commerces ruraux, JO 2024, artisanat… Si toutes ces problématiques inquiètent aujourd’hui les commerçants (indépendants, grossistes ou franchiseurs et franchisés), ces derniers trouveront peut-être leurs réponses autour de l’émergence du Conseil National du Commerce (CNC), lancé le 25 avril dernier par Olivia Grégoire, la ministre déléguée chargée des Petites et Moyennes Entreprises, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme, avec à sa présidence Thierry Mandon (ex-secrétaire d’État de l’Enseignement supérieur et de la Recherche). Focus sur les missions de cette instance de dialogue avec Marie de Boissieu, chef de la sous-direction du commerce, de l’artisanat et de la restauration à la direction générale des entreprises (ministère de l’Economie et des Finances).
Quel est le rôle de la sous-direction du commerce, de l’artisanat et de la restauration, au sein de la direction générale des entreprises ?
Notre mission est déployer la mise en œuvre des politiques publiques qui concourent au développement des entreprises de ces secteurs et de les accompagner dans leur quotidien et à travers toutes leurs transitions actuelles. La planification écologique, la transition numérique, l’autonomie stratégique et tous les enjeux d’attractivité et de ressources humaines. En travaillant étroitement avec des fédérations ainsi qu’avec les territoires et tous les autres ministères puisque la DGE a une vocation interministérielle. Mais aussi avec des opérateurs comme BPI, l’Ademe, CCI ou CMA. Enfin, la DGE a vocation d’orienter les débats, puis d’instruire les demandes prioritaires des acteurs de la filière et de les déployer une fois que le gouvernement les a validées ensuite.
Pouvez-vous rappeler le contexte du lancement de cette institution ? De quelle façon la DGE s’y implique-t-elle?
Le lancement du Conseil National du Commerce est avant tout lié au poids économique du secteur du commerce, puisque cette branche représente 700 000 entreprises, plus de 3,3 millions de salariés et un chiffre d’affaires de 1 740 milliards d’euros. Néanmoins, ce secteur état très hétérogène, il n’est pas aisé à appréhender dans les politiques publiques qui s’y appliquent. C’est pourquoi, le ministère de l’Economie a décidé de rassembler tous les acteurs du commerce en organisant les Assises du commerce en décembre 2021. C’est à cette occasion que les acteurs ont manifesté leur souhait d’avoir une instance de dialogue. D’où l’idée du CNC, lancé en avril 2023 par la ministre Olivia Grégoire et dont le but est de structurer un dialogue efficace avec tous les acteurs du commerce. Car jusqu’à présent nous travaillions de façon bilatérale, soit avec une entreprise, soit avec une organisation professionnelle. Le CNC va donc permettre de structurer des positions uniques et de rassembler tous ces acteurs. Le CNC va donc aussi bien s’adresser aux franchises (tous types), aux professionnels du commerce du détail, comme au commerce de gros. En revanche, l’artisanat et le BTP sont traités via d’autres vecteurs, comme les assises du BTP, par exemple. Enfin, chaque entreprise, fédération ou acteur privé du secteur, sera libre de contribuer à cette instance.
Quels seront les grands thèmes abordés autour de cette instance ?
Le CNC a vocation à traiter l’intégralité des enjeux auxquels font face les commerçants au quotidien : de la simplification des démarches administratives, à la décarbonation des bâtiments, en passant par l’adaptation des compétences, mais aussi l’anticipation des enjeux et les mutations de demain. Par ailleurs, il y aura une force prospective grâce à un travail de veille des marchés, à travers un suivi des évolutions de mode de consommation, des circuits courts, l’innovation avec la maîtrise de l’IA ou du métavers pour les commerces. Mais la liste est non exhaustive !
Pouvez-vous nous présenter les différents groupes de travail mis en place, qui sont aujourd’hui présidés par Thierry Mandon ?
Ce conseil, avec qui la DGE travaille en lien étroit, s’articule autour de 5 axes majeurs de travail : la planification écologique, l’innovation et transition numérique, le commerce dans les territoires, la simplification et la compétitivité. Mais aussi des sujets liés à l’attractivité et aux ressources humaines du secteur. Ce sont ces groupes de travail, qui ont d’ailleurs été lancés au mois de mai, qui identifient les priorités du secteur. Un premier groupe est donc dédié aux enjeux de décarbonation des bâtiments, et aux interrogations relatives au déploiement du décret tertiaire. Les ajustements induits par les lois climat et résilience et Energies Renouvelables font également l’objet d’un suivi attentif.
Le second groupe de travail se penche sur les enjeux des territoires, notamment le commerce rural, l’organisation des prochains Jeux olympiques et paralympiques de 2024 et leurs impacts logistiques pour les commerçants (accès, ouvertures, piétonisation, etc) ou encore la mise en place des ZFE-m (zone à faibles émissions mobilité). Quant au 3ème groupe, il aborde les problématiques de compétitivité des entreprises, autour de la fiscalité, ainsi que tous les enjeux de simplification des démarches administratives (baux commerciaux). Et toute la réglementation qui encadre le numérique, dont la transposition française du DSA et DMA (textes qui vont encadrer l’activité numérique en Europe).
Quant au 4ème groupe de travail, il se focalise sur les compétences et l’emploi, notamment sur l’attractivité des métiers du commerce. Le CNC participe par exemple, dans ce cadre, aux discussions sur la réforme du lycée professionnel avec le ministère de l’Education nationale. A noter que le calendrier de ces groupes de travail s’organisera autour d’une plénière par trimestre avec la ministre et les ministres spécialisés sur les thèmes évoqués. Chaque groupe avancera selon ses échéances et le calendrier du rapporteur et des acteurs.
Certains s’alarment et disent que le commerce physique est mort, comme l’artisanat, par exemple. De quelle façon allez-vous renforcer l’attractivité au commerce ? Par la mise en place de formations ?
Cette question relève d’un double objectif. Le premier étant d’identifier toutes les typologies de formation qui existent, même si CCI et CMA flèchent bien les futurs entrepreneurs vers les formations existantes. Mais il apparaît aujourd’hui nécessaire de cartographier l’intégralité des formations existantes pour dresser le bilan. Et procéder à un recensement des besoins des entreprises afin de voir si l’offre est en adéquation avec la demande. S’il y a des maques, le CNC portera ses positions. À savoir que le secteur du commerce compte plus de 300 métiers, souvent mal identifiés par les étudiants.
Des gérants de points de vente s’inquiètent aussi de la logistique et des plans d’urbanisme autour de l’organisation des Jeux olympiques d’ici l’été 2024. Pouvez-vous détailler l’objet de ces débats ?
L’aspect circulation suscite l’inquiétude des commerçants en raison de la fermeture de certaines voies le temps des JO. Différents groupes d’échanges avec les commerçants ont déjà été mis en place afin d’ identifier les impacts de cet évènement, comme avec la mairie de Paris, par exemple. Les acteurs du commerce pourront réfléchir au sein du CNC aux solutions envisageables.
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Vous parliez de simplification administrative. En quoi cela va-t-il changer le quotidien des commerçants, voir des franchiseurs et de leurs franchisés en termes d’exploitation de commerce ?
Les acteurs remonteront leurs pistes de simplification prioritaires qui seront ensuite instruites par les administrations compétentes. Les sujets d’ouverture dominicale, de baux commerciaux ou encore de soldes pourront ainsi être abordés dans le cadre de ce GT. Pourquoi ne pas aussi réfléchir à la dématérialisation des demandes d’autorisation d’exploitation commerciale, quand on sait que ces démarches sont longues, se font par courrier ou envoi de clé USB, par exemple. Ou démocratiser la création de baux éphémères pour avoir plus de souplesse sur son local ? Et demain pouvoir se désengager plus facilement entre Noël et l’été avec un autre repreneur entre deux? Ce qui faciliterait aussi la transmission d’entreprises…Ce sont en tout cas des pistes de réflexion.
Vous évoquiez aussi le besoin de redonner de l’attractivité aux territoires….
Aujourd’hui plus de 21 000 communes en France sont éloignées du commerce. C’est pourquoi les ministres Olivia Grégoire et Dominique Faure, la ministre déléguée chargée des collectivités, ont lancé un dispositif pour soutenir le commerce rural et relancer la croissance économique et la cohésion sociale de ces territoires (notamment opéré par l’ANCT). Les ministres ont d’ailleurs annoncé au mois de juin, une première vague de 76 lauréats, accompagnés à hauteur de 2,3 millions d’euros.