Créée en 1970 et inspirée de l’univers du rock et aujourd’hui propriété du groupe Royer, la marque Kickers fait désormais partie des rares enseignes du secteur de l’équipement de la personne à tenir bon face à la crise inflationniste. Le secret du chausseur pour renforcer son modèle ? Diversifier ses collections pour toute la famille et optimiser l’espace de stockage dans ses points de vente. Echange avec Nicolas Duchêne, directeur BtoC et retail au sein du groupe Groyer, arrivé au sein de l’enseigne en 2016 pour y développer le pôle e-commerce.
Avant toute chose, parlez-nous du parc commercial actuel de Kickers. Où vous trouve-t-on ?
Notre modèle économique repose en partie sur de la vente BtoB wholesale et notre activité avec les grands comptes de chausseurs, comme les marketplaces (Sarenza, Amazon et La Redoute). Mais depuis quelques années et avec l’essor du BtoC, à l’initiative du petit-fils de Louis Royer (Mickaël), nous vendons aussi nos produits à travers l’activité d’autres partenaires. Dont Les Galeries Lafayette, chez qui nous recensons désormais 20 corners dédiés à l’univers enfant et autour du dépôt-vente, par exemple ! C’est aussi grâce au BtoC et depuis 2020, que l’enseigne a amélioré son omnicanalité. Car nous avons désormais des adresses qui font aussi bien office de boutique, que de points de stockage du Web. Nous continuons à ouvrir des magasins aussi bien avec des affiliés qu’en succursale. Maintenant, sur les corners, quand on sait qu’on a toujours été connus des clients et des familles pour les chaussures ‘premiers pas’, le périmètre de l’enfant est arrivé à maturité. Ce qui n’est pas le cas pour celui de l’adulte. C’est en effet depuis 1980 que l’enseigne vend des chaussures pour enfant ! Entre temps, Kickers qui était au départ mono-produit s’est diversifiée. Avec une collection textile depuis l’an dernier. Notons aussi que le Groupe Royer détient des marques comme Von Dutch, Caterpillar, Dim, ou encore Freegun et Creepers.
Vous avez également modernisé tous vos magasins en passant sous un nouveau concept…
Le concept précédent et son mobilier en bois étaient devenus trop impersonnels. Nous l’avons donc remplacé par un environnement boutique plus coloré et plus attrayant, qui inclut l’intégralité de nos offres. Il est déjà en place sur les boutiques de Toulouse, Lille, Lorient et Angers. Les articles pour bébé (dont premiers pas), enfant et adulte (homme et femme). Le tout présenté au travers d’une coque magasin faite à base de matériaux recyclés ou recyclables. Mieux encore : les espaces (de 50 à 60 m² maximum) sont désormais équipés de sols et d’étagères recouvertes de vinyle et sont tous modulables, en plus de présenter une caisse ouverte. Ce qui permet d’optimiser l’espace de vente dès lors qu’on sait que la chaussure est par nature volumineuse à stocker ! Le magasin n’est donc plus un point de vente à proprement parler, mais sert aussi d’espace de stockage à son gérant. Car c’est bien en développant une stratégie omnicanale que des retailers comme nous apprennent à s’adapter aux attentes du marché. Et à équilibrer la part de trafic sur le Web et boutique.
Comment la marque Kickers fait-elle face à la crise de l’habillement, justement ?
En s’assurant d’avoir toujours le produit disponible pour le consommateur, que ce soit en boutique ou en ligne, et ce, en unifiant le stock dans notre système. La réflexion des équipes a donc été de considérer les boutiques à la fois comme des points de vente mais aussi comme des points de stockage à part entière : il s’agit de réinventer le métier du retail physique, en y intégrant tous les canaux de vente connectés, avec les sites Internet ou les sites partenaires comme La Redoute, Zalando, etc. Pour cela, on s’appuie désormais sur une stratégie de magasins connectés, avec des fonctionnalités ‘omnicanales’ allant de la commande en magasin à expédier chez le consommateur, ou de l’expédition d’un magasin pour une commande Web. Nous sommes donc capables de faire en sorte que les commandes passées via le Web, redescendent à la boutique ; affiliée ou parmi nos succursales, et soient comptabilisées dans le chiffre d’affaires de la boutique. C’est un système motivant pour tous et pour toutes les équipes. Je pense d’ailleurs que, dans le monde du retail traditionnel, qui ne dépend que de la vente en magasin, ne sauront subsister dans les années à venir que les réseaux capables d’adapter leur modèle de vente à cette ominicanalité ! En outre, Kickers lancera dès le mois de mai son nouveau site Internet ! En tout cas, nous enregistrons entre 5 et 6 % de commandes supplémentaires via le ‘click and collect’ depuis la mise en place de ce nouveau service. Et notre ambition est d’avoir entre 20 et 30 % du chiffre d’affaires en provenance des commandes omnicanales.
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Votre clientèle est donc plus familière à l’achat en ligne qu’en magasin ?
Disons que 70 % de nos ventes sont générées par l’activité e-commerce, contre 30 % via les boutiques du réseau. Mais à cela il faut ajouter que notre parc commercial connaît beaucoup de remaniements et que les boutiques réouvrent progressivement. Et si l’on note une progression Web de +70 % entre 2018 et 2019, elle a depuis évolué à 200 %. Mécaniquement donc, la progression Internet profitera aux boutiques Kickers. Mais demain, nous souhaiterions rééquilibrer les choses, à 50/50. En revanche, nous sommes très optimistes sur le taux de revisite de la clientèle, notamment sur la vente des paires enfants que l’on use plus vite, et qui, par conséquent, sont généralement renouvelées par les parents tous les six mois car le pied grandit. Quant aux produits adultes, c’est plutôt un achat tous les ans, ou tous les ans et demi, le besoin étant moindre. En réalité, la récurrence de l’achat dépend du segment produit.
Quelles sont vos ambitions sur le territoire aujourd’hui ?
Nous continuons à ouvrir des magasins en propre suite à la fusion des équipes BtoC, avec en ligne de mire, des emplacements dans les grandes métropoles. Nous avons d’ailleurs ouvert à Lille et Toulouse l’an dernier et signé Nantes début avril. Nous devrions également ouvrir à Lyon d’ici la fin du mois et à Paris fin mai. Kickers aimerait également s’implanter à Rennes, Montpellier et Bordeaux. Ce qui fera trois succursales de plus cette année, pour les 9 du parc actuel. Nous avons aussi pour objectif d’ouvrir dans des villes moyennes de plus de 50 000 habitants avec nos partenaires affiliés. L’idéal étant de pouvoir en recruter 4 à 5 nouveaux par an d’ici 2025. Car à ce jour nous n’avons que deux affiliés, mais contre trois nouveaux qui s’apprêtent à signer. À plus court terme, ce sont 30 boutiques, toutes implantations confondues que Kickers vise d’ici fin 2024. Avant de passer à l’étape suivante à compter de 2025 : s’ouvrir aux capitales européennes sur des pays limitrophes. En ouvrant d’abord en propre, puis en affiliation pour pouvoir là encore convaincre nos (futurs et actuels) partenaires de la pérennité du modèle Kickers !
Avez-vous l’intention d’ouvrir des magasins outlet en réponse à la baisse du pouvoir d’achat des ménages ?
Lorsque je suis arrivé au sein du groupe en 2016, j’ai pris la décision de fermer les boutiques Kickers implantées dans les centres-commerciaux. Nous avions en effet un magasin outlet à Troyes et un magasin d’usine situé dans nos locaux mêmes, à Cholet. Mais nous n’avons pas vocation à en développer de nouveaux. Les équipes préfèrent se concentrer sur la mise en avant du nouveau concept.
Vous parliez d’un lancement de collections textiles l’an dernier. Y a-t-il d’autres nouveautés à venir au sein de l’enseigne ? Cela va-t-il aussi influer sur le panier moyen ?
Oui, la mise en place d’un programme de fidélité à compter du second semestre 2023. Nous avançons aussi sur l’upcycling autour d’un projet de collecte d’anciennes paires de chaussures de la part des clients afin qu’ils puissent bénéficier de remises sur de nouvelles collections. En outre, 50 % de la collection enfants est déjà écoresponsable et la collection adultes, elle, l’est à plus de 30 %. Quant à la collection textile, elle l’est à 100 %, conçue avec des pièces issues d’invendus d’autres marques. Autrement, l’ADN de l’enseigne reste le même : proposer des chaussures doublées en cuir, à mémoire forme et toujours développées avec des podologues. Et toujours deux collections par an avec en moyenne, 650 références, tous modèles enfants et adultes confondus. Quant au ticket moyen, il s’élève aujourd’hui à 75 euros TTC.
Quelles sont les conditions d’accès au réseau pour celles et ceux qui voudraient rejoindre l’enseigne ?
Comptez, pour la mise en place du concept, 5 000 euros de frais d’agencement en plus de 1000 euros du mètre carré, hors frais de gros œuvre et un contrat d’affiliation d’une durée de 5 ans. Enfin, la commission reversée à l’affilié est de 42 % du chiffre d’affaires. Nous estimons également le chiffre d’affaires de l’affilié, à 9 000€ TTC / m² par an. Et puis, là encore, grâce à notre logistique rôdée, c’est 100 % du chiffre d’affaires de l’ensemble des commandes omnicanales, rétribué à la boutique !