La forte baisse du volume d’achats immobiliers a entraîné la faillite de nombreuses agences. Les réseaux de franchises immobilières prennent de leurs côtés des mesures pour ne pas se laisser emporter par la vague.
Les fortes tensions du marché de l’immobilier ont des conséquences lourdes pour les acteurs de la filière. Selon les prévisions de Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim), le marché devrait cette année accuser d’une baisse de l’ordre de -15 %, a annoncé hier Loïc Cantin, président de la fédération.
L’année 2023 devrait repasser sous la barre du million de transactions, pour atteindre environ 950 000 ventes sur l’année. Et avec 150 000 transactions en moins par rapport à l’année 2022, cela constitue la deuxième plus forte baisse des cinquante dernières années.
Restriction dans les conditions d’accès au crédit et hausse des taux ont créé un cocktail explosif qui vient percuter de plein fouet le marché immobilier.
Loïc Cantin, président de la FNAIM
Entre octobre 2021 et aujourd’hui, les taux d’emprunt immobilier sont passés de 1 % à plus de 3 %, voire 4 %. Pour les professionnels du secteur, ce changement de dynamique se traduit par de grandes difficultés. Pire : le nombre de faillites a atteint un niveau inédit depuis 2016.
Ainsi, selon la société spécialisée en données d’entreprises Altarès, les agences immobilières font partie des secteurs les plus sinistrés, avec plus de 500 agences qui ont mis la clé sous la porte ou ont été placées en redressement judiciaire entre mai 2022 et avril 2023.
Aux même dates, un an plus tôt, un peu plus de 300 agences fermaient définitivement leurs portes. Un rythme de fermeture en hausse de 84 % par rapport à la même période en 2022 qui reste toutefois à relativiser. Quand la faillite des agences entre mai 2022 et avril 2023 se chiffre à 500, en 2013, ce sont presque 900 agences qui entraient en défaillance. Autre élément de mise en perspective, la France compte de plus en plus d’agences immobilières : 40 000 aujourd’hui, contre 30 000 il y a 10 ans.
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Des courtiers affectés
Les courtiers sont également à la peine. On estime en effet le nombre de défaillances à 142 en avril, soit une hausse de 78 % en glissement annuel, quand cinq ans plus tôt, ce chiffre ne dépassait pas les 50. Soumis au taux d’usure, le taux maximum auquel une banque peut prêter, les courtiers sont aujourd’hui concurrencés par les banques qui préfèrent traiter directement les dossiers pour obtenir de meilleurs marges, toujours selon Altarès.
Là encore, ces défaillances sont à mettre en perspective dans un contexte où l’activité de courtage a été florissante ces dernières années. Selon l’Association des professionnels intermédiaires en crédit (Apic), le nombre d’intermédiaires en opération de banques et services de paiement immatriculés est passé de 26 700 en 2016 à 34 000 aujourd’hui, soit une hausse de plus de 25 %.
La force du réseau
Après trois années d’euphorie, le marché est donc amené à se réduire pour revenir à la normale, avec une réduction du nombre d’acteurs. Un constat qui pousse les réseaux d’agences franchisées, moins fragilisées que les indépendants, à s’adapter.
« Il y a eu quelques fermetures, mais on ne peut pas dire qu’elles soient liées à la conjoncture. Pour l’instant, il s’agit vraiment de la vie normale d’un réseau de franchise, avec des ouvertures et des fermetures« , assure Delphine Herman, directrice des relations extérieures du groupe Guy Hoquet.
« C’est le marché qu’on surveille, ça ne veut pas dire que nos agences qui sont sur ces territoires sont en danger, bien au contraire« , ajoute-t-elle sur la volatilité des prix dans certaines zones, comme les villes moyennes à l’intérieur du territoire.
Avec un développement s’appuyant sur le modèle de la franchise depuis 2001, le réseau compte aujourd’hui 550 agences et 4 000 collaborateurs. Pour cet acteur majeur de l’immobilier en France, la stratégie de Guy Hoquet est aujourd’hui de redoubler d’effort sur la formation, depuis trois ans disponible en illimité, en présentiel comme en distanciel. L’objectif ? Perfectionner le service client, avec un agent capable de répondre sur tous les sujets autour de l’acte d’achat. « Les particuliers vont avoir un besoin de conseils encore plus fort« , prévoit Delphine Herman.
On a évidemment quelques petites agences sur lesquelles on est particulièrement vigilant, mais on estime que le réseau est armé pour résister, et même performer face à la contraction du marché.
Delphine Herman, directrice des relations extérieures du groupe Guy Hoquet
Jeune réseau d’agences immobilières lancé il y a un an seulement, Zestia assure que son modèle lui permettra de traverser la crise. « On a des cartes en main, il faut savoir jouer avec« , déclare Armand Manival, fondateur de Zestia. « Ce n’est pas la première fois qu’on a des taux à 3 à 5 %, il faut maintenant se concentrer sur les prix d’achat. Quand un taux augmente, il faut faire en sorte de faire baisser le prix d’achat pour garder un équilibre« , ajoute-t-il.
Proposant également des services de courtage, le réseau est aussi confronté à la frilosité des banques, avec lesquelles il est de plus en plus compliqué de travailler. Confiant, le fondateur assure que la bonne dynamique du réseau lui permettra toutefois de continuer sa phase de développement, gardant l’objectif d’une dizaine d’ouvertures sur l’année 2023. « Les process auxquels on a réfléchi pour augmenter les taux de concrétisation font qu’aujourd’hui aucune de nos 3 agences ne risquent de fermer« , partage le fondateur.